Son retour est toujours une ouverture vers l’espérance. Vers l’errance de mon désir que je pose à ses pieds et dont il va se servir pour m’offrir la délivrance que j’espère. Le rejoindre, une évidence qui s’impose.
Je compte les heures, les minutes et même parfois les secondes. Le temps se distille lentement, je lève les yeux vers l’horloge qui se trouve en haut de la porte et je regarde défiler la fine aiguille des secondes.
Elle trotte à une cadence infernale, ne perdant jamais le rythme et ne s’essoufflant jamais non plus. J’admire sa détermination à vouloir faire le tour du cadran quoiqu’il arrive et je la compare à ma volonté de lui obéir et de lui plaire.
Je m’évade de chez moi y laissant ma raison et la sagesse.
Je suis dans le métro, je regarde passer les stations, les yeux flous, je vais enfin le revoir, deux semaines que j’en rêve, deux semaines que je n’ai plus donné à mon corps de jouissance, car c’est à lui que j’ai envie d’offrir ce plaisir qui dort en moi.
Il m’a bien dit que je pouvais jouir, que si c’était trop dur je devais soulager mon corps. Mais ce n’est pas mon corps qui résiste, c’est ma tête, ma volonté. Dans notre contrat, il est écrit que si je veux me masturber je dois lui demander la permission, filmer l’acte et prononcer son prénom pendant celui ci. Je trouve cela beau mais je ne veux pas devoir demander; pas encore, pas maintenant.
Je suis pleine de fierté, pleine de féminité, remplie de cette farouche envie de ne pas céder trop facilement à mes perversions. Je pourrais sans me soucier du reste, le laisser porter mes envies, lui filmer et lui envoyer à la tête ma jouissance, brûler ses yeux et rire, d’avoir autant de pouvoir sur lui, mais je ne m’y résous pas.
Alors je lutte contre ce besoin de laisser glisser mes mains sur ma chatte qui crie famine. Je lutte contre ces images pornographiques, de lui, de nous, qui me saisissent soudainement au détour d’une rue et qui me font m’appuyer au mur de faiblesse. Je lutte contre son odeur que j’ai l’impression de sentir partout. Je lutte contre moi même de toutes mes forces car je sais que la jouissance que j’aurais sera encore plus forte que les autres.
Je me fruste et je me brusque, j’avance vers notre rencontre, vers son retour, vers notre amour. Alésia, je descend, je suis tout prés du but, il y a au bout de ces rues qui s’emmêlent le renouvellement de mon enchaînement. Je veux être délivrée, mais je me mens, je veux qu’il m’attache encore plus fort à lui. Je veux qu’il s’enduise de moi, qu’il me tiraille, qu’il entrave ma vie, ma volonté mon corps et qu’il y dépose sa marque, son odeur, son label. Je rêve même parfois qu’il me marque au fer rouge, d’une belle marque incandescente que je pourrais admirer tous les jours ou il ne sera pas prés de moi.
Je me souris à moi même, je suis tourmentée, attirée, effrayée, animée d’une volonté sans failles qui me pousse toujours un peu plus vers lui et qui me fait demander les clés de la chambre d’un hôtel parisien, célèbre et orienté sur les vices.
L’ascenseur est matelassé, chambre de décompression pour aliénés à la lumière tamisée. Il porte toutes les promesses, tous les désirs inachevés, tous les espoirs en construction. Sacré contraste avec l’accueil blanc aux ailes d’ange qui se veut rassurant. J’entends les désirs de tous ces gens qui sont montés ici. Ça se consume en moi, j’ai chaud, je transpire d’envies.
Il a choisi la Colère pour commencer. Sans doutes, testerons nous tous les autres vices ? Nous en avons tant à nous deux. Des envies, des addictions, des perversions. Nous profanons la normalité du désir, celle qu’on nous impose et dont nous ne voulons plus depuis bien longtemps. Nous préférons nous rouler dans la dépravation de la luxure dont nous nous parfumons sans limites. Il vient avec des outils, je viens avec mon corps comme seul décor. Ma volonté de me soumettre s’accouple avec la sienne, celle de dominer mon âme pour traverser le plaisir par strates. Je suis à lui…..
J’ouvre la porte, tout est rouge, noir, tagué. Néon, fluo, Marie-Antoinette au sourire figé, recouverte de graffitis postmodernes. Du carrelage noir, une moquette pleine de “Guns” et comme une lancinante complainte, Bang Bang inscrit au plafond en grosses lettres noires et distinctes. Une de nos phrases mythiques, qui veut tout dire, qui porte nos espoirs, nos envies , notre sexualité hors du temps.
Je me déshabille, entièrement et je plie soigneusement mes vêtements que je range dans le placard noir. Je ne veux plus aucune trace du dehors, de la vie, du temps qui passe. Je n’ouvre pas les rideaux, j’aime bien etre dans le semi noir, tout me semble plus mystérieux.
J’écoute le silence, je l’attendrais à genoux, tête baissée, sur le lit, écartant bien les jambes pour qu’il puisse voir tout de suite la source de la vie, ma chatte offerte, mon cul palpitant.
C’était son souhait, mais je veux le transfigurer, je m’installe, je prend la pause en l’attendant. J’use ma patience, mes genoux et mes bras, je ne bouge pas, je me contente de penser et je pose mes pinces à tétons pour éprouver cette douleur lancinante qui ressemble à l’attente.
Ou est il ? je ne sais pas…. à quelle heure sera t-il là ? je ne sais pas ……mais je reste là immobile, n’osant plus bouger de peur de rater le moment magique ou il franchira la porte.
Au bout d’un moment dont je ne connais pas la durée tant je suis perdue dans mes pensées, mon téléphone vibre, un seul mot, net et précis, sans appel, tel le verdict pour un condamné. “Réception”
La réceptionniste doit lui sourire pendant que j’ai le cul tendu vers la porte. Il doit appuyer sur le bouton de l’ascenseur, pendant que mes tétons sont rouges et me tiraillent. Il doit marcher dans le couloir pendant que je l’imagine me toucher.
Puis soudain, la porte s’ouvre et la lumière renaît dans ma tête, j’entends ses pas sur la moquette agressive, il pose son sac, son cœur s’accélère, je ferme les yeux et laisse sa main se poser sur moi, en silence, sans un bruit…..
c’est beau